Ca se passe un samedi soir, dans un petit théâtre bruxellois. Je n'avais pas très envie d'y aller, au départ. La flemme. C'est comme ça, ces temps-ci. J'oscille entre un dynamisme ébouriffant et une grosse flemme paralysante, traversée d'inexplicables pointes de stress. Samedi, le stress n'y était pas. Mais la flemme, si. Pas emballée à l'idée de passer la soirée debout au milieu d'inconnus ni de devoir fendre la foule et jouer des coudes pour atteindre le bar.
La flemme...
Mais pas vraiment envie de lutter non plus. Pas envie d'en parler.
On y est donc allé sans se poser de questions. C'était dans le programme de la soirée... Et on a même attrapé le bus prévu, pour une fois. Bon présage.
En arrivant sur place, je me disais qu'on ne resterait probablement pas longtemps mais que bon, ce serait cool de voir du monde. Puis, on a découvert que le concert aurait lieu dans le bar, en toute intimité, et ce fut le début d'une de ces soirées rares, hors du temps. Le commencement de ce truc un peu dingue qu'on appelle ici "bonheur".
Ce genre de moments, on ne sait jamais quand ça vous tombe dessus. Pas que ça aille mal, pour l'instant, au contraire. J'ai quasiment intégré mon statut de fille chanceuse. Mais personne n'est à l'abri des stress quotidiens, des migraines, insomnies et autres contrariétés des gens normaux. Personne... Pas même les filles chanceuses. Le bonheur, quand je le croise, a donc, toujours, ce goût unique qui transforme les soirées banales en pures pépites. Et ce fut le cas ce soir-là.
Calés sur les deux dernières chaises libres, nous avons, une heure durant, écouté ce petit groupe américain nous chanter ses balades folk intimistes, tandis que, savourant mon Orval à toutes petites gorgées, je me souvenais d'une adolescente qui voulait faire comme eux. Etre sur scène. Longtemps, longtemps, j'ai souffert de ce rêve. Ce rêve inaccessible qui ne collait pas avec moi, ce rêve trop grand. Mais samedi, j'ai pris conscience que cette amertume, ce goût de trop peu n'existait plus. Ca fait un moment, sans doute, qu'il s'est envolé, laissant la place à une foule d'autres espoirs plus ou moins stupides, plus ou moins fous mais toujours méchament enthousiasmants. N'empêche... Brusquement, je me suis sentie différente. Légère, légère... D'une légèreté désarmante.
Et à partir de là, j'ai profité de tout. De la bière, des murs rouges et de ses bras. Des notes aussi. De jolies notes. Et regardant les deux petites personnes sur scène avec un sourire béat, je me suis laissée gagner par ce truc-là. Le bonheur. Ca avait quelque chose quasi indécent. Mais qu'importe. C'était grand...
"C'était" parce qu'évidemment, ce genre de moments, ça ne dure pas. Mais ça reste quand même quelque part. Et quelque part, c'est tout ce qui compte.
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3 commentaires:
Il y a de ces moments imprévus, imprévisibles qui, soudainement, se révèlent tout simplement « magiques ». Il faut donc vivre pleinement ces trop rares instants et les graver à tout jamais dans notre mémoire. Car, chacun d’eux est unique…exceptionnel.
Le bonheur a toujours quelque chose d'indécent. C'est aussi pour ça qu'il est éphémère. Non ?
Très beau texte, franchement.
Merci à tous les deux. Le bonheur est éphémère parce qu'indécent, indécent parce qu'éphémère, éphémère parce que grand, grand parce qu'éphémère et indécent... Huhu. Je me perds un peu, moi. Mais oui, une chose est sûre: il faut le vivre pleinement.
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